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Parures de Petitebijou

Publié depuis Overblog

4 Mars 2013

Ce roman m’a été recommandé par plusieurs lecteurs, avec le même enthousiasme. Formidable, terrible, coup de poing, inoubliable, les arguments n’ont pas manqué.
Un roman noir. Très noir. Mais si bien écrit.
Chaque lecteur a ses limites. Les miennes ont largement été atteintes. Ce roman est une abjection. Bien écrit, terrible, coup de poing, mais pas formidable, et que je vais m’empresser d’oublier.
Ceci étant posé, il y avait 264 pages à lire. J’en ai lu la moitié avec application, survolé l’autre moitié pour m’en débarrasser.
Je m’étais engagée à lire « Pike », et j’aime tenir mes engagements.
Maintenant que j’en ai terminé, je m’interroge : quel plaisir peut-on prendre à lire de telles scènes qui dépassent en sadisme et en violence tout ce que j’ai pu lire jusqu’à présent ? L’auteur se délecte dans les descriptions les plus détaillées des corps mutilés, avilis, souillés, défoncés, hommes, femmes, enfants, animaux…
J’ai lu d’autres romans dans lesquels la violence est paroxystique : Breat Easton Ellis, James Ellroy, et cela m’a déjà été difficile. J’ai renoncé à lire un roman de Jean-Claude Izzo, pourtant magnifique écrivain, pour une scène insoutenable. Mais il y avait des trouées d’air respirable dans tout ce marasme.
Ici, et je me doute que c’est ce que les amateurs trouvent si remarquable, l’air est toujours vicié. Il y a bien une minuscule respiration au détour d’un tout petit chapitre dans lequel un personnage rêve plus ou moins d’une vie meilleure. Mais ces passages sont tellement décalés et d’un onirisme bancale qu’ils n’oxygènent en rien. Il y a bien cette relation entre le héros et la petite fille, la petite fille et le boxeur, une sorte de trame en conte de fée, au travers de dialogues qui soudain semblent prendre une teinte poétique. Je n’y ai pas adhéré, l’auteur ayant écrit ces passages avec moins d’enthousiasme que les scènes de meurtres et autres réjouissances.
J’ai été en colère tout particulièrement par le traitement des personnages féminins. Encore un choix de romancier, me dira-t-on, c’est vrai, mais la femme que je suis, et je ne dis pas la lectrice, ne peut être que nauséeuse à la lecture de scènes qui je ne doute pas sont plausibles, et c’est sûrement parce que je n’en doute pas que cela m’est insupportable. Peut-être parce que j’ai connu dans ma « vraie » vie des moments, heureusement rarissimes, où j’ai pu être confrontée à l’âme humaine dans toute sa noirceur. J’ai dû y perdre la capacité à prendre la distance nécessaire à la lecture de telles scènes. C’est ainsi : comme pour le reste, on ne lit qu’avec ce qu’on est et qu’avec ce qui nous a construit ou détruit. Par ailleurs, lisant un livre, contrairement à un film visionné, on projette les images de son théâtre intérieur. Voilà pourquoi cela nous atteint davantage. Cela nous est plus familier.
Même si je ne le comprends pas, je peux envisager que l’on puisse lire ce polar, le refermer en disant : qu’est-ce que c’était bien !! Ce n’est pas mon cas. Pourtant, je ne recherche pas une littérature aseptisée, décrivant un monde idéal. Je cherche le plaisir de lire des histoires humaines, dans leur ambivalence, leur paradoxe, leur grandeur comme leur faiblesse. Peut-être certains lecteurs trouvent dans « Pike » un exutoire à leurs pulsions sadiques, que nous portons tous en nous. Cela n’est pas mon cas non plus, et je dis ceci sans jugement. A la limite, je trouve ces lecteurs naïfs et chanceux de posséder cette capacité de mise à distance.
Certes, pour revenir à des considérations purement littéraires, l’auteur a un style. Mais le style est un support à l’histoire. L’intrigue, objectivement, est assez classique. Hormis les détails de la trame, j’en ai deviné les grandes lignes, su qui mourrait et qui survivrait. Aucune surprise au mot fin.
Juste un soulagement à en avoir terminé avec ce déversement de pourriture à mes yeux trop complaisant.

Pike - Benjamin Whitmer

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M
Je n'ai définitivement plus envie de lire ce roman... pas besoin de se torturer avec des scènes de ce genre !
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